Le rythme : une géométrie fractale qui rend la musique agréable

Article publié le 23 juillet 2013
Pour citer cet article : , « Le rythme : une géométrie fractale qui rend la musique agréable  », Rhuthmos, 23 juillet 2013 [en ligne]. https://www.rhuthmos.eu/spip.php?article950

Ce texte a déjà paru sur Techno-science.net. Des chercheurs découvrent la formule mathématique du rythme et avancent que notre cerveau pourrait être câblé pour y répondre.


Une nouvelle étude montre que tout compositeur, de Bach à Brubeck, répète des motifs rythmiques, de sorte que la partie reproduit le tout. Une équipe de recherche dirigée par les neuroscientifiques Daniel Levitin et Vinod Menon, respectivement des universités McGill et Stanford, a analysé les partitions de quelque 2 000 compositions de divers genres musicaux occidentaux qu’ont écrites plus de 40 compositeurs au cours des 400 dernières années.


Les chercheurs ont mis au jour une formule mathématique qui gouverne les motifs rythmiques auxquels chaque pièce musicale se conforme, sans exception. « En musique, nous savons depuis quelques décennies que la distribution des hauteurs tonales et de la sonie est au diapason de motifs mathématiques prévisibles », explique le professeur Levitin. « Le rythme est encore plus fondamental à notre jouissance de la musique : c’est au rythme que réagissent d’abord les bébés, c’est le rythme qui nous pousse à nous lever et à bouger, et ce n’est donc pas vraiment étonnant de découvrir que le rythme suit à son tour une formule mathématique semblable. »


Dans toutes les compositions musicales qu’ils ont étudiées, les chercheurs ont découvert une même qualité fractale, selon laquelle la partie est une répétition morcelée du tout. C’est-à-dire que la plus grande structure temporelle des pièces musicales bien formées comporte des motifs qui répètent leur propre structure temporelle à court terme. Les chercheurs ont aussi constaté que chaque compositeur possède sa signature rythmique. « C’est l’une des observations imprévues et passionnantes de notre recherche », dit le professeur Levitin. « Les rythmes de Mozart étaient les moins prévisibles, ceux de Beethoven l’étaient le plus, et ceux de Monteverdi et Joplin avaient une distribution entrelacée quasi identique. Mais chacun avait une signature rythmique bien à lui que l’on peut reconnaître. À la lumière de notre étude, le rôle du rythme pourrait être encore plus important que la hauteur tonale dans la transmission du style distinctif d’un compositeur. »


Des flocons de neige aux frondes de fougère et aux bouquets de brocoli, les motifs fractals s’observent partout dans la nature. Découvrir que quatre siècles de compositions musicales obéissent à cette même règle mathématique semble indiquer que le cerveau des compositeurs pourrait avoir intégré des régularités du monde physique pour recréer une autosimilarité dans une œuvre d’art musical. Du reste, en s’appuyant sur des travaux amorcés au cours des années 1970, les auteurs avancent que nos systèmes sensoriel et moteur pourraient avoir une propension fondamentale à percevoir et à produire des motifs fractals dans les trois dimensions de l’espace, qui transcende les époques.


Pour le professeur Levitin, persuadé par un directeur d’étude de premier cycle de faire un doctorat en psychologie plutôt qu’en mathématiques, arguant qu’il pourrait faire des mathématiques en étudiant la psychologie, mais non l’inverse, cette étude assure une harmonie parfaite entre ses deux intérêts.


La recherche a été subventionnée par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, la Fondation canadienne pour l’innovation et la Fondation nationale des sciences des États-Unis.

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