Les rythmes de l’individuation en Chine ancienne – Marcel Granet

Pascal Michon
Article publié le 15 juin 2014
Pour citer cet article : Pascal Michon , « Les rythmes de l’individuation en Chine ancienne – Marcel Granet  », Rhuthmos, 15 juin 2014 [en ligne]. https://www.rhuthmos.eu/spip.php?article1218

Extrait de P. Michon, Rythmes, pouvoir, mondialisation, Paris, PUF, 2005, p. 58-66.


Les travaux de Marcel Granet sur la Chine ancienne, accomplis au cours des mêmes années que ceux de Mauss et d’Evans-Pritchard, sont très importants pour notre connaissance de l’histoire des rythmes de l’individuation [1]. Ils restituent le passage d’un type de société relativement archaïque, encore en partie polysegmentaire, à une société unifiée, beaucoup plus différenciée et où se sont déjà installés des pouvoirs plus ou moins centralisés . Or, ils montrent que le rythme a joué un rôle tout aussi grand dans cette société, l’une des plus sophistiquées et des plus développées de l’Antiquité, que dans les sociétés plus simples qu’elle a remplacées [2].


Comme ceux de Mauss et d’Evans-Pritchard, le travail de Granet a fait l’objet de lectures qui constituent aujourd’hui de véritables « obstacles épistémologiques » au sens de Bachelard et qu’il nous faut d’abord lever. On a ainsi regardé comme une préfiguration des conceptions lévi-straussiennes son insistance à critiquer celles qui faisaient du Yin, du Yang et du Tao des principes abstraits, des substances ou bien encore des forces, et leur remplacement par des catégories déterminées par un système d’oppositions symboliques [3]. Selon Bruno Karsenti, Granet serait l’un des premiers à avoir substantivé l’adjectif « symbolique » et à l’utiliser, à l’instar de Mauss, comme concept d’« un système de signes, organisé comme un langage, et en tant que tel producteur de sa propre cohérence et de ses propres significations » [4]. Et il est vrai que, dès l’introduction de La Pensée chinoise, Granet déclare, à propos du langage, être parti « des symboliques […] pour signaler certaines dispositions de l’esprit chinois » [5]. Il parle du « système national de symboles » (p. 27) et conclut : « On le reconnaîtra sans doute : si un esprit systématique apparaît dans ces conclusions provisoires, c’est que j’avais à définir l’esprit d’un système » (p. 30). Il est vrai, également, que tout au long de son étude, Granet insiste sur le caractère « emblématique » des grandes « catégories » chinoises : « L’antithèse du Yin et du Yang paraît résumer tous les contrastes. Cette antithèse n’est en rien celle de deux Substances, de deux Forces, de deux Principes. C’est tout simplement celle de deux Emblèmes, plus riches que tous les autres en puissance suggestive. À eux deux, ils savent évoquer, groupés par couples, tous les autres emblèmes » (p. 124 et 126). Il est exact, enfin, que Granet fait apparaître le caractère substituable des emblèmes : « Les Chinois multiplient les systèmes de classification, puis ils multiplient les imbrications de ces systèmes. Ils évitent tout ce qui rendrait comparable et ne s’attachent qu’à ce qui paraît substituable  » (p. 331). Tout cela, à première vue, a l’air de converger et semble donner une orientation structurale à la pensée de Granet.


Mais, de même que pour ses deux contemporains, ce vocabulaire est trompeur, car il ne prend son sens qu’au sein d’une pensée qui est entièrement dominée par la question du rythme. Comme Mauss et Evans-Pritchard, Granet n’a rien de structuraliste, ni même de pré-structuraliste. Il n’apparaît en ces termes qu’au prix d’une distorsion et d’un singulier appauvrissement de sa pensée, dont l’origine remonte à la lecture lévi-straussienne. Il serait temps, plus d’un demi-siècle après la mort de Granet, de dégager son œuvre des surinterprétations qui la recouvrent et de l’interroger de nouveau sur ce qui était sa préoccupation méthodologique première : penser la question des formes de mouvement qui était au centre de la pensée chinoise [6].


Pour retrouver le cœur de la pensée granétienne, je partirai de l’un des exemples qui est passé longtemps pour l’une des préfigurations d’une approche structurale. Dans le chapitre II du Livre III de La Pensée chinoise, Granet fait une analyse très détaillée des tableaux de correspondances entre le microcosme et le macrocosme auxquels se référaient les ritualistes, les médecins et les philosophes de la Chine ancienne. Dans un gigantesque système de correspondances et d’inter-actions se répondent ainsi, par séries de cinq, les Éléments, les Orients, les Couleurs, les Saveurs, les Odeurs, les Aliments végétaux, les Animaux domestiques, les Lares ou Parties de la Maison, les Génies des Orients, les Souverains, les Notes de musique, les Nombres, les Binômes de signes cycliques dénaires, les Classes d’animaux, les Activités humaines, les Vertus, les Passions, les Gestes, les Éléments corporels et les Viscères (p. 375-382). Tous ces tableaux montrent à première vue un ou plutôt des systèmes de signes à la fois substituables et opposables les uns aux autres. D’une part, chaque élément d’une série peut être associé ou remplacé par un élément de n’importe quelle autre série. Une des cinq Couleurs évoquera immédiatement l’une des cinq Odeurs, qui évoquera à son tour l’un des cinq Orients, etc. [7] De l’autre, les éléments d’une série se différencient les uns des autres de la même manière que les éléments de toute autre série. Il y a entre les cinq Éléments une relation différentielle identique à celle qui distingue les cinq Orients, et il en est de même avec toutes les séries d’emblèmes à la suite. Nous sommes donc apparemment en présence des axes paradigmatique et syntagmatique d’une structure au sein de laquelle chaque position semble définir une « valeur » au sens classique de « différentielle interne ». Tout cela n’est pas complètement faux, mais on oublie de dire que toutes ces oppositions et permutations ne sont permises et ne peuvent prendre sens que parce qu’elles sont en fait portées et actualisées par le rythme de l’Univers : « “La note kio [8] (=Est-Printemps=Bois), par exemple, émeut le foie et met l’homme en harmonie avec la Bonté parfaite”. Rien ne peut aussi bien que cette phrase de Sseu-ma Ts’ien signaler l’interaction emblématique et la solidarité profonde qui unissent le physique et le moral sous la domination du rythme cosmique [c’est moi qui souligne] » (p. 377-378).


De la même manière que chez Mauss et Evans-Pritchard, une grande partie des lecteurs de Granet n’ont vu que la structure, là où la temporalité et le rythme sont premiers. Tous ces tableaux, que l’on a fait passer longtemps pour le centre de sa pensée, ne sont en réalité que des fixations synoptiques de quelque chose que les Chinois, et Granet lui-même après eux, voyaient comme des formes du mouvement du monde. Le Yin, le Yang, le Tao et toutes les classifications par quatre ou par cinq que les Chinois ont multipliées, ne constituent pas tant, en effet, des principes, des catégories, ni même des rubriques symboliques, au sens que nous donnons à ces mots, que des rythmes. Le Tao, par exemple, est défini dans l’un des plus anciens textes conservés qui lui aient été consacrés, le Hi ts’eu [9] , par la formule suivante : « yi yin yi yang tche wei Tao Tout yin, tout yang, c’est là le Tao » [10]. Or, Granet fait remarquer que cette phrase ne donne pas au Tao le sens d’une catégorie par laquelle s’opérerait une synthèse ou une somme du Yin et du Yang, ou, à l’inverse, de laquelle ceux-ci émaneraient comme des hypostases d’un être immobile, central et unitaire du monde, mais – ce qui est tout différent et qui échappe à l’ontologie occidentale traditionnelle – le sens de « régulateur de l’alternance » : « Le Tao est un Total constitué par deux aspects qui sont, eux aussi, totaux, car ils se substituent entièrement (yi) l’un à l’autre. Le Tao n’est point leur somme, mais le régulateur (je ne dis pas : la loi) de leur alternance. La définition du Hi ts’eu invite à voir dans le Tao une Totalité, si je puis dire, alternante et cyclique. La même Totalité se retrouve dans chacune des apparences, et tous les contrastes sont imaginés sur le modèle de l’opposition alternante de la lumière et de l’ombre. Au-dessus des catégories Yin et Yang, le Tao joue le rôle d’une catégorie suprême qui est, tout ensemble, la catégorie de Puissance, de Total et d’Ordre » (p. 325). Comme le Yin et le Yang, le Tao est une catégorie concrète ; il n’est pas un Principe premier : « Il préside réellement aux jeux de tous les groupements de réalités agissantes, mais sans qu’on le considère ni comme une substance, ni comme une force. Il joue le rôle d’un Pouvoir régulateur. Il ne crée point les êtres : il les fait être comme ils sont. Il règle le rythme des choses. Toute réalité est définie par sa position dans le Temps et l’Espace ; dans toute réalité est le Tao ; et le Tao est le rythme de l’Espace-Temps » (p. 325). Le Tao n’est donc pas un principe général, ni une force suprême, ni même une substance commune, il est « la règle de toute mutation » qui permet à la fois la production du monde et sa manipulation : « Dans la langue technique de la divination, le mot Tao exprime la règle essentielle qui se retrouve au fond de toute mutation – mutation réelle comme mutation de symboles –, car elle préside globalement à l’ensemble des mutations. Le Tao apparaît, dès lors, comme le Principe d’Ordre qui préside à la fois à la production – par voie d’alternance – des apparences sensibles et à la manipulation – par voie de substitution – des rubriques emblématiques qui signalent et suscitent les réalités. Il est tout ensemble (car entre l’ordre technique, l’ordre réel, l’ordre logique, il n’y a pas lieu de distinguer) le Pouvoir de régulation, qu’on obtient en manipulant les emblèmes, le Savoir efficace qui préside aux substitutions de symboles, l’Ordre actif qui se réalise, par de perpétuelles mutations, dans la totalité de l’Univers » (p. 328).


On voit donc pourquoi réduire les emblèmes à des signes classificatoires est insuffisant : on rate entièrement leur aspect pragmatico-dynamique. L’ordre et le savoir ne sont pas dissociables du pouvoir. Ce n’est qu’en tant que formes de mouvement que les emblèmes prennent éventuellement une fonction classificatoire. Les Chinois, d’une manière générale, « prêtaient à leurs emblèmes un pouvoir de figuration qu’ils ne distinguaient pas d’une efficience réalisatrice » (p. 24). Les notions de classe et de hiérarchie ne sont donc jamais dissociées de celle d’efficacité qui prime sur l’une et l’autre. Granet montre toujours les deux aspects liés, ce qui l’amène à souligner l’importance déterminante du rythme pour la pensée chinoise ancienne : « La notion de Tao dépasse les notions de force et de substances, et le Yin et le Yang qui valent indistinctement comme forces, substances et genres, sont encore autre chose puisque ces emblèmes ont pour fonction de classer et d’animer tout ensemble les aspects antithétiques de l’Ordre universel : le Tao, le Yin et le Yang évoquent synthétiquement, suscitent globalement l’ordonnance rythmique qui préside à la vie du monde et à l’activité de l’esprit. La pensée chinoise semble entièrement commandée par les idées jointes d’ordre, de total et de rythme » (p. 25).


Ainsi la pensée chinoise apparaît-elle comme a-substantialiste ou a-ontologique, mais elle l’est d’une manière très différente du structuralisme. Le système classificatoire des oppositions symboliques indexées sur les deux emblèmes majeurs du Yin et du Yang n’apparaît pas du tout comme une structure composée de relations purement différentielles, comme Lévi-Strauss qui s’appuyait sur le modèle très réducteur de la phonologie le croyait, mais comme un ensemble d’oppositions, non pas exclusives mais au contraire inclusives, se réalisant rythmiquement  : « La distinction du Même et de l’Autre est primée par l’antithèse de l’Équivalent et de l’Opposé. Les réalités et les emblèmes se suscitent par simple résonance quand ils sont équivalents ; ils se produisent rythmiquement quand ils sont opposés […] Toutes ces rubriques se relaient à l’ouvrage (les divers Éléments faisant alterner leur règne, aussi bien que le Yin et le Yang) : les classifications les plus détaillées ne servent qu’à traduire un sentiment plus complexe de l’Ordre et une analyse (plus poussée sans devenir jamais abstraite) des réalisations rythmiques de cet Ordre dans un Espace et un Temps entièrement composés de parties concrètes » (p. 336).


On peut facilement refaire cette démonstration à propos d’autres types d’emblèmes. Je ne prendrai qu’un seul exemple supplémentaire, mais très significatif et important dans une optique comparative : celui des nombres. Granet montre que les nombres, surtout ceux des séries finies dénaires et duodénaires, qui doublent la série infinie décimale, servent certes à classer et à hiérarchiser le monde, mais aussi que ces usages ne prennent sens que dans une pratique plus globale d’intégration dynamique. Prenons pour commencer les deux séries des nombres pairs et impairs. Ils permettent à la fois de distinguer et de relier les unes aux autres un très grand nombre de réalités, ce qui pour la pensée chinoise ancienne a pour vertu de les rendre intelligibles : « Les nombres, pairs et impairs, ont pour premier emploi de distribuer l’ensemble des choses dans les catégories Yin et Yang » (p. 276). Si nous nous intéressons maintenant au nombre cinq [11], nous pouvons observer le même fonctionnement intellectuel. Celui-ci sert à relier les cinq Sens, les cinq Orients, les cinq Éléments, les cinq Vertus, etc. Il constitue donc la forme des liens qui existent entre des réalités apparemment disjointes de l’Univers : « Ne voit-on pas que les Cinq Éléments sont les grandes Rubriques d’un système de correspondances, qu’il n’y a pas lieu de traiter ni de substances, ni de forces, que ce sont, d’abord, les symboles des Cinq regroupements de réalités emblématiques réparties dans les Cinq Secteurs de l’Univers ? […] Il faut donc voir dans les Cinq Éléments les emblèmes d’une répartition générale des choses dans un Espace-Temps où le tracé du templum délimite quatre aires et marque un centre » (p. 311). Les nombres sont donc des opérateurs de division et d’association. Toutefois, ici encore, Granet précise que cette fonction « classificatoire » des nombres s’inscrit dans une conception « protocolaire » et « rythmique » de l’Univers qui seule lui donne sens : « On les employait à ajuster aux proportions cosmiques les choses et les mesures propres à chaque chose, de façon à montrer que toutes s’intègrent dans l’Univers. L’Univers est une hiérarchie de réalités. À la fonction classificatoire des Nombres s’ajoute immédiatement une fonction protocolaire. Les Nombres permettent de classer hiérarchiquement l’ensemble des groupements réels » (p. 292). Or, ces hiérarchies renvoient elles-mêmes à des cycles temporels : « Cette conception permet (en dehors de leurs emplois pratiques) d’utiliser les Nombres à la seule fin de rendre manifestes la structure du Monde et les ordres successifs de civilisation par lesquels s’exprime le rythme de la vie universelle » (p. 275). Ainsi faut-il « reconnaître aux Nombres, comme leur attribut essentiel, une fonction classificatoire […] Assimilés à des sites, et toujours considérés en rapport avec des Temps et des Espaces concrets, les Nombres ont pour rôle essentiel non pas de permettre des additions, mais de représenter et de lier entre eux divers modes de divisions, valables pour tels ou tels groupements », mais Granet précise : « Plutôt qu’à supputer des quantités différentes on les emploie à noter les organisations variables qu’on peut attribuer à tels ou tels ensembles. Les différences qualitatives de ces groupements et leur valeur de Total absolu intéressent beaucoup plus que leur valeur arithmétique, telle que nous l’entendons » (p. 207-208).


La pensée chinoise ancienne, au moins telle que Granet nous la restitue ici, apparaît donc entièrement centrée sur la notion de rythme, en tant que forme de l’individuation. De même que dans les sociétés archaïques, nous l’avons vu, le rythme n’est en rien mécanique et n’est pas non plus de l’ordre du cyclique ou du cosmique ; en Chine ancienne, le Tao n’a pas le sens d’un retour périodique du même, ni celui d’une simple alternance de temps forts et de temps faibles. Le Tao, note François Jullien, doit se comprendre comme une régulation sans règle (Granet précisait : « le régulateur (je ne dis pas la loi) ») : « Régulé ne signifie pas seulement “régulier” : le terme exprime que la régularité en question n’est pas donnée d’avance, qu’elle est constamment à promouvoir : régularité à l’œuvre, dynamique – donc dont la voie est toujours inédite » [12]. Ou pour le dire autrement, le Tao est une modulation sans modèle, comme le montre explicitement l’interprétation, restituée par Jullien, d’un lettré chinois du XVIIe siècle, Wang Fuzhi : « Ce serait trahir l’idée de la régulation, dit celui-ci, que de s’imaginer que celle-ci pourrait obéir à un modèle préétabli ; et ce serait, en particulier, se tromper complètement sur le sens de la formule initiale de ce paragraphe : “un yin-un yang, c’est ce qu’on appelle la Voie (de la régulation)”, que de croire qu’elle puisse signifier : “un yin, puis un yang, un yin puis un yang” de façon machinale : comme deux fils qu’on ne cesserait de faire alterner sur une trame pour “tisser” la toile » [13] .


Le rythme, sous cette forme non métrique, tient lieu pour la pensée chinoise ancienne, sans en être un simple analogon, des oppositions sur lesquelles s’est massivement construite de son côté la pensée occidentale, mais aussi la pensée indienne. Il rend inopérant les oppositions du Sacré et du Profane, du Pur et de l’Impur, de la Gauche et de la Droite : « Les Chinois n’opposent pas fortement la religion à la magie, pas plus que le pur à l’impur. Le sacré et le profane ne forment pas eux-mêmes deux genres tranchés. La Droite peut être consacrée aux œuvres profanes sans devenir l’antagoniste de la Gauche » [14]. Il remplace également les oppositions du Même et de l’Autre, de l’Être et du Non-Être, de l’Être et du Devenir, du Transcendant et du Mondain, du Signe et de la Chose, du Sujet et de l’Objet. D’une manière générale, il forme le paradigme d’une pensée étrangère à tout dualisme ou, comme le dit aujourd’hui François Jullien, d’une pensée de « l’immanence » : « La distinction du Même et de l’Autre est primée par l’antithèse de l’Équivalent et de l’Opposé. Les réalités et les emblèmes se suscitent par simple résonance quand ils sont équivalents ; ils se produisent rythmiquement quand ils sont opposés […] Le Yin et le Yang ne s’opposent pas à la manière de l’Être et du Non-Être, ni même à la manière de deux Genres. Loin de concevoir une contradiction entre deux aspects yin et yang, on admet qu’ils se complètent et se parfont (tch’eng) l’un l’autre – dans la réalité comme dans la pensée » [15].


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Notes

[1M. Granet, La Pensée chinoise, Paris, 1934, rééd. Paris, Albin Michel, 1968.

[2Il est vrai qu’une bonne partie des faits les plus anciens rapportés par Granet est reconstituée au gré d’une démarche comparative très inspirée par les travaux de Durkheim et de Mauss. Il nous faudra donc faire la différence entre ce que Granet pense probable (les structures sociales antérieures à l’époque de la royauté et de la féodalité) et les faits mieux établis qui touchent essentiellement à l’époque suivante.

[3Lévi-Strauss, comme pour Mauss, est le premier à faire le rapprochement. Voir Les Structures élémentaires de la parenté (1949), Paris-La Haye, Mouton, (nouv. éd. revue) 1968, p. 358 sq. ; pour une étude plus récente voir Y. Goudineau, Introduction à la sociologie de Granet, Thèse en ethnologie, Université de Paris X, 1982.

[4B. Karsenti, L’Homme total, Paris, PUF, 1997, p. 188. Dans une note Karsenti ajoute : « Cet usage des notions de “symbolique”, ou de “système de symbolisation”, traverse continûment l’œuvre de Granet ».

[5M. Granet, La Pensée chinoise, op. cit., p. 21. Souligné par l’auteur.

[6Il me semble que la réflexion de François Jullien va aujourd’hui dans ce sens.

[7« Il y a, comme on voit, correspondance stricte entre les Signes célestes et les Activités humaines qui occupent le même rang dans l’énumération », M. Granet, op. cit., p. 375.

[8Pour les noms des œuvres ou les mots cités par Granet j’ai préféré, par souci de simplicité, garder l’orthographe qu’il utilisait. Pour les noms de dynasties et de lieux auxquels je me réfère pour ma part, j’utilise en revanche la transcription pin yin.

[9Qui est lui-même un appendice du manuel divinatoire nommé Yi King, daté par la tradition du Ve siècle, mais composé plus probablement aux IVe-IIIe siècles. M. Granet, op. cit., p. 116, n. 4.

[10Pour un commentaire récent de cette formule, voir F. Jullien, Figures de l’immanence. Pour une lecture philosophique du Yi King, Paris, Grasset, 1993, p. 257.

[11Il s’agit bien ici de nombres et non de chiffres, puisque leur valeur ne se définit pas par leur capacité à être combinés à d’autres chiffres pour exprimer des nombres.

[12F. Jullien, Figures de l’immanence. Pour une lecture philosophique du Yi King, Paris, Grasset, 1993, p. 267.

[13Ibid., p. 265.

[14On voit que Granet, par souci pour la spécificité de la pensée qu’il étudie, n’hésite pas, quand il l’estime nécessaire, à s’opposer à Durkheim (et à Hertz) sur un point pourtant central pour sa sociologie. M. Granet, op. cit., p. 363.

[15Ibid., p. 336.

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