Une bibliographie commentée sur les temps dans le contexte urbain

Article publié le 2 février 2014
Pour citer cet article : , « Une bibliographie commentée sur les temps dans le contexte urbain  », Rhuthmos, 2 février 2014 [en ligne]. https://www.rhuthmos.eu/spip.php?article1121

Ce texte a déjà paru dans T. Paquot, Le quotidien urbain, Paris, La Découverte, 2001, p. 180-188. Nous remercions Thierry Paquot de nous avoir autorisé à le reproduire ici. Les intertitres sont les nôtres.



Établir une bibliographie sur les temps dans le contexte urbain se révélerait vite une impossible, et prétentieuse, ambition. Qui aurait l’outrecuidance de pouvoir la réaliser ? Il est moins vain et plus modeste, et certainement commode pour les lecteurs, de rassembler les ouvrages marquants sur la question des temporalités citadines, sachant qu’un tel travail est sans cesse à refaire et qu’il est par nature insatisfaisant. Ni exhaustive ni pointue, une telle bibliothèque se prétend simplement être celle de l’honnête femme et de l’honnête homme qui espèrent toujours compléter leur lecture, développer leur point de vue, enrichir leur argumentation, bref, réagir à un texte — et aux idées qu’il contient — par d’autres réflexions, d’autres recherches, d’autres critiques.


Introductions : L’essai de Jean Chesneaux, Habiter le temps. Passé, présent, futur : esquisse d’un dialogue politique (Bayard Éditions, 1996) a le grand mérite de présenter de manière claire et sans jargon, l’état du débat philosophique autour de la question du « temps », et de l’articuler à la compréhension des transformations qui affectent la modernité-monde. Ainsi cet essai aborde-t-il le temps mondial, les modifications de la quotidienneté, les rythmes des villes, etc. Il complète, renforce et actualise la réflexion de l’auteur sur la modernité (De la modernité, La Découverte, 1983 et Modernité-monde, La Découverte, 1989).


Approches comparatives : Les références sont principalement occidentales, aussi convient-il de lire l’essai de François Jullien, Du « temps ». Éléments d’une philosophie du vivre (Grasset, 2001), qui très brillamment compare la conception chinoise à la conception occidentale du temps, de la durée, de l’instant, de l’éternité, du continu, etc. Toujours sur la Chine, les « classiques » demeurent irremplaçables : Marcel Granet (La Civilisation chinoise et La Pensée chinoise, Albin Michel, 1929 et 1934), et Joseph Needham (« Le temps et l’homme oriental », in, La Science chinoise et l’Occident, trad. franç. Seuil, 1973 et Dialogue des civilisations Chine-Occident, choix de textes et présentation de Georges Métailié, La Découverte, 1991). Certains travaux de Mircea Eliade concernent le temps et apportent de quoi alimenter une étude comparée, comme Images et symboles. Essais sur le symbolisme magico-religieux (Gallimard, 1952) et Le Sacré et le Profane (trad. franç. Gallimard, 1965, l’édition allemande date de 1957). Le texte de Raimundo Panikkar, « Le Temps circulaire : temporalisation et temporalité » (in, Temporalité et aliénation, sous la direction de Enrico Castelli, Aubier, 1975) qui explore la pensée indienne en la matière, mérite le détour, de même que le remarquable article de Louis Massignon, « Le temps dans la pensée islamique » (in, Eranos Jahrburg, n° 20, Rhein Verlag, Zurich, 1952). Les Cultures et le temps, ouvrage collectif introduit par Paul Ricœur (Payot/UNESCO, 1975) offre un grand échantillon de conceptions du temps. Ce remarquable volume rassemble les essais de Claude Larre (sur la Chine), Raimundo Panikkar (sur l’Inde), Alexis Kagame (sur la pensée bantou), G.E.R. Lloyd (sur la Grèce), André Néher (sur la culture juive), Germano Pattaro (sur la conception chrétienne), Louis Gardet (sur l’islam) et A.Y. Gourevitch (sur l’histoire). Chaque contribution possède sa bibliographie.


Approches philosophiques : La philosophie de Martin Heidegger domine la réflexion contemporaine, il est indispensable de s’y plonger, à commencer par son ouvrage de 1927, Être et Temps (traduction Emmanuel Martineau, Athentica, 1985) et « Temps et être », conférences de 1962 (trad. franç. Questions IV, Gallimard, 1976). Il est souhaitable de lire, parmi d’innombrables articles et essais commentant la pensée de cet immense philosophe, Heidegger et la question du temps, par Françoise Dastur (PUF, 1990), Heidegger et son siècle. Temps et être, temps de l’histoire, par Jeffrey Andrew Barash (trad. franç. PUF, 1995), Introduction à la lecture de Être et temps de Martin Heidegger, par Hervé Pasqua (L’Âge d’Homme, 1993) et Heidegger. Introduction à une lecture, par Christian Dubois (Seuil, « Points essais », 2000). Aux côtés de, et à partir de, Martin Heidegger, on trouve les œuvres personnelles et exigeantes de Paul Ricœur (Temps et récit, trois volumes, Seuil, 1983, 1984 et 1985 ; La Mémoire, l’histoire et l’oubli, Seuil, 2000), Emmanuel Lévinas (Le Temps et l’autre, Fata Morgana, 1979, rééd. PUF, 1983 ; Dieu, la mort et le temps, Grasset, 1993), Henri Maldiney (Aîtres de la langue et demeures de la pensée, L’Âge d’Homme, 1975).


Autres approches historiques et philosophiques : Comme le « temps » est une préoccupation majeure des philosophes occidentaux depuis les Grecs, il est évident que la plupart d’entre eux ont écrit sur ce thème. Il est hors de question de s’aventurer dans une liste, qui tel un puits sans fond, serait à jamais incomplète, autant consulter les catalogues des « bonnes » bibliothèques… Citons néanmoins les essais de Jean-Pierre Vernant regroupés dans Mythe et pensée chez les Grecs (Maspero, 1965) ; de Pierre Aubenque, Le Problème de l’être chez Aristote, (PUF, 1962) ; Du temps chez Platon et Aristote par R. Brague, (PUF, 1982), Le Mystère du temps. Approche théologique, par Jean Mauroux (Aubier, 1962) et divers articles de Henri-Charles Puech rassemblés dans En quête de la gnose (Gallimard, deux volumes, 1978) ; La Genèse de l’idée de temps, par Jean-Marie Guyau (avec un liminaire de Thierry Paquot et une introduction de Alfred Fouillé, réédition « Les Introuvables », L’Harmattan, 1998, la première édition posthume date de 1902) et les écrits de Gaston Bachelard (L’Intuition de l’instant, Stock, 1931 ; La Dialectique de la durée, PUF, 1950, dans lequel il aborde la question de la rythmanalyse qu’il emprunte à un auteur brésilien Lucio Alberto Peinhiro Dos Santos et La Poétique de l’espace, PUF, 1957, dans lequel il invente la « topoanalyse »). L’Ordre du temps (Gallimard, 1984) de Krzysztof Pomian examine avec érudition et simplicité l’événement, la répétition, l’époque, la structure et les diverses manières de penser et de calculer le temps, aussi bien psychologique, philosophique que biologique.


La mesure et les représentations du temps : La mesure du temps concerne moins d’ouvrages, néanmoins l’offre est abondante, contentons-nous d’en citer quelques-uns : La Mesure du temps. Arts et métiers, modes, mœurs, usages des Parisiens du XIIe au XVIIIe siècle, par Alfred Franklin (Plon, 1888), bien documenté, original et souvent anecdotique ; Le Traité du sablier, par Ernst Jünger (trad. franç. Christian Bourgois, 1970, l’édition allemande est de 1954), remarquable méditation, érudite et magnifiquement écrite ; L’Heure qu’il est. Les horloges, la mesure du temps et la formation du monde moderne, par David S. Landes (trad. franç. Gallimard, 1987, l’édition américaine est de 1983) est une somme qui retrace l’histoire mondiale de l’horloge et plus généralement de l’emploi du temps. Deux essais mi-anthropologiques, mi-philosophiques sont à questionner : La Danse de la vie. Temps culturel, temps vécu, par Edward T. Hall (trad. franç. Seuil, 1984, l’édition américaine est de 1982) et Le Temps à soi. Genèse et structuration d’un sentiment du temps, par Helga Nowotny (trad. franç. Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1992, l’édition allemande date de 1989). On peut compléter ces lectures par la vive synthèse de G. J. Whitrow, Time in History. The Evolution of our General Awareness of time and Temporal Perspective, (Oxford University Press, 1988), l’agréable essai sur l’Histoire du week-end, de Witold Rybczynski (trad. franç. Liana Lévi, 1992, l’édition américaine est de 1991), L’Apologie de « L’Art de la sieste », par Thierry Paquot (Zulma, 1998) et les trois solides tomes de l’Histoire des mœurs, sous la direction de Jean Poirier (Gallimard, « Encyclopédie de la Pléiade », 1990-1991) et en particulier « Histoire du comput et de quelques calendriers » et « L’année sacrale, la fête et les rythmes du temps », par Louis Molet (tome 1), « De la tradition à la postmodernité : la machine à civiliser », par Jean Poirier (tome 2) et « L’homme et la mort », par Louis-Vincent Thomas, « Loisir : valeurs résiduelles ou existentielles ? », par Joffre Dumazedier et « Styles et modes de création », par Jean Duvignaud (tome 3).


La vie quotidienne : La vie quotidienne est le thème et le titre d’une collection, lancée en 1938 chez Hachette et si tous les volumes ne sont pas excellents — l’événement prime toujours sur l’analyse —, nombreux valent le détour, par la masse d’informations qu’ils charrient et les comparaisons qu’ils facilitent. Généralement un ou plusieurs chapitres décrivent les différences qui existent entre la quotidien urbain et l’ordinaire villageois et le lecteur peut toujours y glaner quelques anecdotes. Mais les historiens, à la suite du mésestimé Alfred Franklin (l’auteur de La Vie privée d’autrefois : arts et métiers, modes, mœurs, usages des Parisiens, du XIIe au XVIIIe siècle, d’après des documents originaux ou inédits, Plon, 1895-1902, 27 volumes) et stimulés par Lucien Febvre, dédaignent de moins en moins la vie de tous les jours de nos ancêtres et s’évertuent à en reconstituer aussi bien le cadre matériel que l’univers mental : Guy Thuillier (Pour une histoire du quotidien au XIXe siècle en Nivernais, Mouton, 1977 et L’Imaginaire quotidien au XIXe siècle, Economica, 1985) ; Daniel Roche (Histoire des choses banales. Naissance de la consommation XVIIe-XIXe siècle, Fayard, 1997) ; Alain Corbin (Les Cloches de la terre. Paysage sonore et culture sensible dans les campagnes au XIXe siècle, Albin Michel, 1994) ; Louis Chevalier (Montmartre du plaisir et du crime, Robert Laffont, 1980 et Histoires de la nuit parisienne, 1940-1960, Fayard, 1982), etc. Un tel intérêt se manifeste également en Allemagne (Histoire du quotidien, sous la direction de Alf Lüdtke, trad. franç. Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1994) et en Italie, que l’on songe, par exemple, aux ouvrages particulièrement originaux de Piero Camporesi.


Les temps du quotidien : C’est la sociologie qui a délimité, puis exploré, ce vaste domaine longtemps déconsidéré qu’est la quotidienneté. Les fondateurs de la discipline, tant en France (Durkheim, Mauss, Halbwachs, Maunier, Tarde, etc.) qu’en Allemagne (Weber, Simmel, Sombart, etc.) et aux États-Unis (de Thomas à Goffman) ont marqué un réel intérêt pour le quotidien sans toutefois lui offrir le statut d’un concept. Il faut attendre Henri Lefebvre et la publication en 1947, chez Grasset, d’un premier volume intitulé Critique de la vie quotidienne (les trois tomes sont dorénavant disponibles aux éditions de L’Arche, tome 1, 1958 ; tome 2, 1961 ; et tome 3, 1981). Ce sont le familier, l’ordinaire, l’à-côté du travail (autre nom pour dire « loisir »), le banal, l’insolite, le bizarre, l’inattendu, etc., que se propose d’étudier dans une perspective marxiste, Henri Lefebvre afin de construire une théorie de la désaliénation. Le second volume est davantage théorique et s’attache à élaborer une critique du progrès, du développement inégal, de la théorie des besoins et surtout à proposer sa « théorie des moments » (sachant que : « Nous appellerons “moment” la tentative visant la réalisation totale d’une possibilité. »). Le troisième volume réévalue les deux premiers et les actualise, tout en énonçant les principes de la rythmanalyse, « science nouvelle en voie de constitution », qui permet, selon l’auteur, de déchiffrer les discontinuités à l’œuvre dans les temporalités sociales. René Lourau, dans sa préface à l’édition posthume des Éléments de rythmanalyse. Introduction à la connaissance des rythmes (Syllepse, 1992) de Henri Lefebvre, insiste sur ce « jardin secret ». Georges Gurvitch, dans le tome second de La Vocation actuelle de la sociologie (PUF, 1963), présente une étude intitulée « La multiplicité des temps sociaux » qui propose à la fois une typologie (il dénombre « huit genres de temps sociaux ») et une autre manière de les examiner que celle préconisée par l’historien Fernand Braudel (« Histoire et sociologie », Traité de sociologie, sous la direction de Georges Gurvitch, tome 1, PUF, 1958-1960).


Temps de travail et temps quotidien : Les sociologues du travail, et Georges Friedmann en premier, ont pris à cœur d’étudier les temps extérieurs à l’usine, au bureau, à l’atelier, car ils ont constaté lors de leurs enquêtes que les deux temps (celui du travail et celui du loisir) se conditionnent mutuellement, même si le loisir est subordonné à l’emploi. C’est ce que démontre William Grossin dans un ouvrage dorénavant « classique », Les Temps de la vie quotidienne (Mouton, 1974). Ses observations des temps du quotidien l’ont amené à fonder une « écologie du temps » (Pour une science des temps. Introduction à l’écologie temporelle, Octares éditions, Toulouse, 1996) qui vise à connaître les cadres temporels, le milieu temporel, les représentations temporelles, afin d’agir sur les interférences temporelles et réduire les « pollutions » temporelles qui dégradent l’environnement temporel… Presque symétriquement, on trouve les travaux consacrés au loisir et en premier chef ceux de Joffre Dumazedier, le fondateur de la sociologie du loisir (Vers une civilisation du loisir ?, Seuil, 1962 ; Loisir et Culture (avec A. Ripert), tome 1, « Le loisir et la ville », Seuil, 1966 ; Espace et loisir, tome 1 et 2 (avec M. Imbert), Centre de recherche sur l’urbanisme, 1967 ; Sociologie empirique du loisir, Seuil, 1974 ; Révolution culturelle du temps libre 1968-1988, Méridien Klincksieck, 1988) ou ceux de Paul Yonnet (Travail, loisir. temps libre et lien social, Gallimard, 1999) pour qui « travail » et « loisir » vont ensemble.


Vie quotidienne et société urbaine : La littérature sociologique sur le quotidien est impressionnante et l’on peut toujours y découvrir quelques heureuses réflexions sur l’articulation vie quotidienne/société urbaine, comme : La Vie quotidienne des familles ouvrières, par Paul-Henry Chombart de Lauwe (CNRS, 1956, troisième édition avec une « Introduction » inédite, 1979) ; L’Invention du quotidien, par Michel de Certeau (UGE, 10/18, 1980) ; La Vie quotidienne, par Jean Grenier (Gallimard, 1968) ; Microsociologie de la vie quotidienne, par Abraham Moles (Denoël-Gonthier, 1976) et Psychosociologie de l’espace (textes rassemblés par Victor Schwach, L’Harmattan, 1998) ; Éloge de la lenteur, par Pierre Sansot (Payot, 1998) ; Les Donneurs de temps, sous la direction de G. Pillet et P. Amphoux (Castella, Albeuve-Suisse, 1981) ; Les Temps sociaux, sous la direction de Daniel Mercure et Anne Wallemacq (Éditions universitaires et De Boeck Université, Bruxelles, 1988), avec en particulier les études de M. Elchardus et I. Glorieux (« Signification du temps et temps de la signification ») et de William Grossin (« Pour une écologie temporelle ») ; Sur l’aménagement du temps. Essais de chronogénie (essais de Michel Serres, Jean-Pierre Dupuy, Joël de Rosnay, René Zazzo, Nicolas Schöffler, Edgar Ascher, Jean Cloutier et Ernest-Jean Kaelin, Denoël-Gonthier, 1981) ; L’Homme malade du temps (avec des contributions de Alain Reinberg, Paul Fraisse, Hubert Montagner, Claude Leroy, Henri Poulizac, Guy Vermeil, Henri Péquignot, Pernoud/Stock, 1979) ; Temps de travail, temps sociaux, ouvrage coordonné par Annie Gauvin et Henri Jacot (Liaisons sociales, 1999) ; Temps et ordre social, par Roger Sue (PUF, 1994) ; Travail intégré, société éclatée, par Frédéric de Coninck (PUF, 1995) ; Le Temps des femmes. Pour un nouveau partage des rôles, par Dominique Méda (Flammarion, 2001) ; « Sur le concept de vie quotidienne et sa sociologie » de Claude Javeau (Cahiers internationaux de sociologie, vol. LXVIII, PUF, 1980) ; « La vie quotidienne. Essai de construction d’un concept sociologique et anthropologique », par Christian Lalive d’Épinay (Cahiers internationaux de sociologie, vol. LXXIV, PUF, 1983) et « Sur le concept de vie quotidienne », par Norbert Elias (Cahiers internationaux de sociologie, n° 99, PUF, 1995) qui émet de nombreuses réserves quant à cette notion (il est également l’auteur de Über die Zeit, publié en 1984 et traduit en français en 1996, Du temps, Fayard). D’autres critiques radicales du temps imposé par le déploiement technologique sont exprimées par Jean Robert dans un percutant essai au titre éloquent, Le Temps qu’on nous vole. Contre la société chronophage (Seuil, 1980) et par Paul Virilio dans ses nombreux et stimulants essais, dont La Vitesse de libération (Galilée, 1995).


La nuit : La nuit suscite depuis peu quelques curiosités, Night as frontier de M. Melbin (Free Press, New York, 1987) ; La Nuit désenchantée, par Wolfgang Schivelbusch (trad. franç. Le Promeneur, 1993, l’édition allemande est de 1983) ; « La Nuit » (Sociétés et Représentations, 1997, CREDHESS) ; « Nuits et lumières » (Les Annales de la recherche urbaine, n° 87, 2000) et Les Douze Heures noires. La nuit à Paris au XIXe siècle, par Simone Delattre (Albin Michel, 2000).


La vie quotidienne, la ville et l’aménagement urbain : Sur les relations entre la vie quotidienne, la ville et l’aménagement urbain, il existe de nombreux travaux, souvent dispersés et pas nécessairement reliés entre eux. Ainsi le mouvement anglais Archigram s’intéresse-t-il à la ville de l’instantanéité et un architecte comme Yona Friedman à la ville mobile et à l’architecture qui lui correspond (L’Architecture mobile, Casterman, 1970 et Utopies réalisables, UGE, 10/18, 1975). De même Nicolas Schöffer, le théoricien de La Ville cybernétique (Tchou, 1969) s’évertue-t-il à modeler le « matériau temps », à fonder un « chronodynamisme » qui associe le diurne et le nocturne, à décrire les « villes de loisirs » (sexuels, spirituels, statiques, en mouvement, etc.) et à s’évader de la « carapace temporelle » en multipliant les « microtemps » qui échappent aux vieilles notions de « durée », « instant », « infini », « commencement », « fin », etc. Les situationnistes investissent la vie quotidienne, dans le cadre de la société marchande, de la société de consommation, pour en détourner les éléments constitutifs, les enrichir par le biais de la « dérive » et promouvoir une « ville ludique », New Babylon (« Une critique de l’urbanisme moderne », par Thierry Paquot, dossier « Guy Debord et l’aventure situationniste », Magazine littéraire, n° 399, juin 2001). Pierre Antoine et Abel Jeannière rassemblent leurs articles parus dans Projet et Études, sous le titre Espace mobile et temps incertains. Nouveau cadre de vie, nouveau milieu humain (Aubier, 1970) et dont le contenu n’est guère éloigné des préoccupations actuelles sur le temps, la vitesse, les modes de vie et les réseaux. Parmi les recherches plus récentes : « Mode de vie dans sept métropoles européennes », par Bernard Préel (Données urbaines, 1, sous la direction de Denise Pumain et Francis Godard, Anthropos-Economica, 1996) ; « Le sens du travail et le sens de l’habiter », par Richard Sennett (Cerisy. Les métiers de la ville, sous la direction de Édith Heurgon et Nikolas Stathopoulos, Les Éditions de L’Aube, 1999) ; Villes du XXIe siècle (colloque de La Rochelle, sous la direction de Thérèse Spector et Jacques Theys, CERTU-ministère de l’Équipement, 1999) ; « Les lieux de transport : des centres commerciaux au XXIe siècle ? », par François Bellanger, « Mobilité et densité urbaine », par Vincent Fouchier, « Ville et vitesse : une certitude et beaucoup de questions », par André Pény (Les Vitesses de la ville, sous la direction de André Pény et Serge Wachter, Les Éditions de L’Aube, 1999) ; « Les usages du temps à partir des études de mobilité : points de repères », par Jean-Pierre Orfeuil, « La fréquentation des espaces marchands : regroupement et dispersions », par René Péron, « Une politique des horaires urbains », par Matthias Eberling, « Politiques sur les temps urbains : le panorama des villes italiennes », par Sandra Bonfiglioli et « Un temps pour la ville », par Ulrich Mückenberger (Entreprendre la ville. Nouvelles temporalités-Nouveaux services, coordonné par Alain Obadia, Les Éditions de L’Aube, 1997), le dossier « Emplois du temps » de la revue Les Annales de la recherche urbaine (n° 77, 1997), avec « Une ville à temps négociés » de Jean-Yves Boulin, « Temporalités étudiantes : des mobilités sans qualités », par Michel Bonnet et « Du vivre en juste temps au chrono-urbanisme », de François Ascher.


Chronotopie  : La chronotopie vient d’Italie : Il tempo della citta, par Carmen Belloni (Franco Angeli, Milano, 1984), L’Architettura del tempo, par Sandra Bonfiglioli (Liguori editore, Napoli, 1990) et sous la direction de Sandra Bonfiglioli et Marco Mareggi, « Il tempo e la città fra natura e storia. Atlante di progetti sui tempi della città. », Urbanistica Quaderni (supplemento al n° 107, Piani, 1997). William Mitchell, architecte américain, a publié deux ouvrages sur les répercussions des nouvelles technologies de l’information sur le cadre bâti, la disparition de certains bâtiments devenus obsolètes (l’hôtel de ville, l’université, le gigantesque centre hospitalier, etc.) et la réorganisation de la vie citadine, le tout avec un optimisme certain, City of bits : Space, Place and the Infobahn (MIT-Press, 1996) et E-topia. « Urban Life, Jim — but not as we know it » (MIT-Press, 1999). Deux chercheurs, Bruno Marzloff (du groupe Chronos) et Alain Guez (de l’observatoire de la chronomobilité, Parcours) répondent à Monique Dreyfus, « À la recherche du temps maîtrisé » (Diagonal, n° 141, janvier-février 2000). « Ville et quotidienneté. Essai sur le quotidien urbain, ses temporalités et ses rythmes », par Thierry Paquot, dans l’ouvrage collectif dirigé par Ingrid Ernst (à paraître). François Ascher, dans son essai Ces événements nous dépassent, feignons d’en être les organisateurs (Les Éditions de L’Aube, 2000), consacre le chapitre six (« La maîtrise des espacestemps », p. 173 et sq.) à l’examen critique des diverses analyses des temps urbains (riche bibliographie, p. 262 et sq.). Il a codirigé, avec Francis Godard, l’excellent supplément au numéro 337 de La Recherche, « ville.com » (décembre 2000) avec des contributions de Marc Guillaume (« La nouvelle socialité des hypervilles »), William J. Mitchell (« L’avènement des cyberquartiers »), Philippe Moati (« Risques et promesses du e-commerce »), Frédéric Ocquetau (« Les caméras nous menacent-elles ? »), Pierre Chambat (« Vers une agora d’internautes ? ») et des entretiens avec Manuel Castells et Jean-Pierre Orfeuil. Entreprendre la ville. Gérer les temporalités : du travail à la ville, est publié sous la direction de Francis Godard (Les Éditions de l’Aube, 1997) ; du même auteur, « Les temps des villes et le sens du rythme », dans Le Projet urbain sous la direction de André Sauvage (Les Éditions de La Villette, 2000). Édith Heurgon, qui dirige la recherche à la RATP, ne cesse de commanditer des études et d’en présenter les résultats, son ouvrage Nouveaux Rythmes urbains : quels transports ? (Les Éditions de L’Aube, 2001) coécrit avec Jean-Paul Bailly témoigne de la richesse des enquêtes et de la confrontation entre chercheurs et « opérateurs ». Enfin signalons le rapport, Temps des villes, rédigé par Edmond Hervé à la demande de Nicole Pery (secrétaire d’État aux Droits des femmes et à l’Égalité professionnelle) et Claude Bartolone (ministre délégué à la Ville).

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