M. Macé, Façons de lire, manières d’être

Article publié le 6 octobre 2011
Pour citer cet article : , « M. Macé, Façons de lire, manières d’être  », Rhuthmos, 6 octobre 2011 [en ligne]. https://www.rhuthmos.eu/spip.php?article425

M. Macé, Façons de lire, manières d’être, Paris, Gallimard, 2011.

 La lecture est l’une de ces conduites par lesquelles, quotidiennement, nous donnons un aspect, une saveur et même un style à notre existence.


« J’allais rejoindre la vie, la folie dans les livres. […] La jeune fille s’éprenait de l’explorateur qui lui avait sauvé la vie, tout finissait par un mariage. De ces magazines et de ces livres j’ai tiré ma fantasmagorie la plus intime… » Lorsque le jeune Sartre lève ainsi une épée imaginaire et se rêve en héros après avoir lu les aventures de Pardaillan, il ne fait rien de très différent de ce que nous faisons tous quand nous lisons, puissamment attirés vers des possibilités d’être et des promesses d’existence.


C’est dans la vie ordinaire que les œuvres se tiennent, qu’elles déposent leurs traces et exercent leur force. Il n’y a pas d’un côté la littérature, et de l’autre la vie, dans un face-à-face brutal et sans échanges qui rendrait incompréhensible la croyance aux livres, un face-à-face qui ferait par exemple des désirs romanesques de Sartre (ou de la façon dont Emma Bovary se laisse emporter par des modèles) une simple confusion entre la réalité et la fiction, et par conséquent un affaiblissement de la capacité à vivre. Il y a plutôt, dans la vie elle-même, des formes, des élans, des images et des styles qui circulent entre les sujets et les œuvres, qui les exposent, les animent, les affectent.


Dans l’expérience ordinaire de la littérature, chacun peut ainsi se réapproprier son rapport à soi-même, à son langage, à ses possibles : car les formes littéraires se proposent dans la lecture comme de véritables formes de vie, engageant des conduites, des démarches, des puissances de façonnement et des valeurs existentielles. La lecture n’est pas une activité séparée, c’est l’une de ces conduites par lesquelles, quotidiennement, nous donnons un aspect, une saveur et même un style à notre existence.

 Spécialiste de littérature française moderne, Marielle Macé est chercheur au CNRS. Elle est notamment l’auteur de Le Temps de l’essai. Histoire d’un genre littéraire en France au XXe siècle (Belin, 2006).


On trouvera un compte rendu de cet ouvrage ICI.

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