V. Fabbri, Paul Valéry : le poème et la danse, Paris, Hermann, 2009.
– On connaît de Valéry quelques beaux textes sur la danse, en particulier L’Âme et la danse, mais à s’en tenir là, on sous-estime l’importance que cet art eut sur le développement de sa pensée et de son œuvre. Valéry témoigne d’une véritable sensibilité pour la danse, sensibilité qui se nourrit d’expériences diverses de la scène et d’une réflexion sur les relations entre les différents arts. Ce qui se joue dans son intérêt constant pour la danse, c’est une conception de la culture qui met l’accent sur sa dimension physique et sensible, autant que sur les productions intellectuelles. C’est aussi une conception de l’art comme acte. À partir de la danse, il développe l’idée d’une intelligence sensible qui le fascinait déjà chez Léonard et Berthe Morisot, et qui fait la matière de l’étonnant personnage de Monsieur Teste, esprit aigu, aux « paroles le plus adroitement touchantes », d’une « terrible obstination dans des expériences enivrantes ». La danse et les danseuses appartiennent à cette série de figures, subtiles et puissantes.
L’essai que nous proposons reconstitue le parcours d’un poète en danse depuis ses moments les plus méconnus : premières expériences du ballet et du music hall en compagnie de Pierre Louÿs, Mallarmé, Degas, premiers projets de ballet. Il procède à partir de là à une relecture de L’Âme et la danse, et à une analyse de son œuvre pour la scène, réalisée avec Ida Rubinstein, Arthur Honegger, Massine et Fokine. Ce parcours permet d’éclairer à nouveaux frais ses derniers textes plus théoriques sur la danse, marqués par la recherche d’une autre scène.
– Véronique Fabbri est philosophe, ancienne directrice de programme au Collège International de Philosophie, enseignante associée à l’École d’Architecture de Paris-La Villette.