Ana Paula Marcante Soares : « Des rythmes et des résonances temporels du vécu urbain. Étude anthropologique sur la mémoire collective et les formes de sociabilité dans le contexte urbain d’une ville brésilienne », Colloque Penser la ville aujourd’hui dans la littérature et les arts – Théâtre Lucio Costa, Maison du Brésil, Cité Internationale Universitaire de Paris – 13 juin 2013
Depuis ses origines, la ville crée une relation étroite entre son espace physique et des relations sociales. Le capital économique, social, financier converge vers la ville, où les relations sociales, politiques et économiques sont établies, c’est-à-dire où les biens de reproduction du capital et de la force de travail sont concentrés. Avec l’augmentation de la population qui quitte la campagne vers la ville à la recherche d’opportunités de travail, il y a une inévitable accentuation des « problèmes urbains ». La ville, étant construite selon les modèles médiévaux, n’a pu répondre aux demandes de la démographie et est devenue insalubre. Il s’est avéré nécessaire d’établir une description des phénomènes sociaux – objet d’investigation anthropologique, afin de les ordonner de façon quantitative et descriptive. C’est alors, au XIXe siècle, qu’ont surgi la Statistique et la Sociologie comme versants de la pensée moderne indispensables à la réflexion sur la croissance de la ville.
Penser la ville est aussi penser la société. Alberto Manguel, dans son livre La cité des mots, considère la littérature et la politique comme des méthodes ou des théories qui essaient de donner une définition de la société, de son identité et, par conséquence, de l’identité de ses citoyens. L’auteur présente deux théories pour lire la société à partir de l’observation de la ville : le langage créatif et le langage créé, c’est-à-dire la littérature et la politique.
Les évidences de ce « monde de la ville » apparaissaient déjà dans les registres littéraires et picturaux de la Modernité. Dans les arts plastiques, le réalisme de Gustave Courbet et de Gustave Doré est un exemple de la direction autonome qu’a pris l’artiste, lors de la représentation du peuple dans le quotidien de la ville où habitaient les artistes en décadence et les enfants misérables. Dans la littérature du XIXe siècle, la ville commence à apparaître dans les physiologies. Mais c’est au XXe siècle que penser la ville devient encore plus urgent. La Première Guerre mondiale, la crise des valeurs esthétiques, la violence, la révolte, la révolution, la misère humaine font de la ville un grand terrain vide.
Ce colloque propose donc de penser la ville dans la perspective du langage créatif, c’est-à-dire à travers la littérature et les arts : la ville en tant que corps d’inscriptions ; sa lisibilité et/ou son illisibilité, puisqu’on peut penser à la ville comme un palimpseste, un corps/support avec son histoire en constant chevauchement. Ces multiples lectures peuvent se développer selon trois axes : la ville et le corps ; la ville et la mémoire ; la ville en tant que texte.