Dunkerque
05 février 2019
Artiste protéiforme, figure complexe de la création au XXe siècle, architecte et musicien hors normes, Iannis Xenakis (1922-2001) est un de ces « héros ne ressemblant à aucun autre » selon les mots d’Olivier Messiaen (Hugues GERHARDS, 1981). D’origine grecque, Xenakis se revendiquait aussi « citoyen métèque de tous les pays (en art aussi) » (Iannis XENAKIS, 1971). Riche de cette pluralité, il se plaçait lui-même « entre les mondes ».
Ce colloque Iannis Xenakis, entre les mondes vise ainsi à mettre en évidence le travail et l’héritage artistique d’un homme engagé pour la paix, qui s’émancipe en « errant » d’un territoire à un autre, d’une discipline à une autre. Soixante ans après la réalisation (puis la destruction en 1959) du premier grand manifeste xenakien de cette croisée des mondes, le Pavillon Philips de l’Exposition universelle de Bruxelles 1958, véritable pavillon multimédia avant l’heure, la recherche sur le travail xenakien n’a pas fini d’interroger la question des frontières et de leur franchissement. De l’Architecture à la Musique, de la théorie à la pratique, de l’art à la science, Iannis Xenakis montra l’exemple d’une libre circulation, toujours guidé par les lois de la Nature, si ce n’est par une visée universelle de la création.
Les interventions de cette journée d’étude ont pour objectif de renouveler les débats concernant ces frontières, notamment la dialectique architecture / musique, centrale dans le processus de création xenakien. Elles viseront également à mettre en perspective un « entre les mondes » dans le travail de conception, d’invention, de composition, non seulement de Iannis Xenakis, mais aussi de toutes celles et tous ceux pour lesquels ce citoyen des mondes peut constituer un modèle.
Zoé Declercq « Pour une pensée du rythme dans l’œuvre de Iannis Xenakis : réflexions sur un geste créateur “entre les mondes” »
Le concept de rythme, couramment défini et pensé à partir d’une vision musicale et métrique héritée de Platon, connaît actuellement une transformation sémantique qui s’observe au sein d’une pluralité de domaines et de recherches non-concertées (Pascal MICHON, 2013). Le rythme recouvre désormais, dans un monde dit fluide, son sens initial Pré-platonicien proche du rhuthmos entendu comme manière particulière de fluer ou modalités d’accomplissement d’une forme dans le temps. Cette mutation qui s’exprime à partir d’un texte fondateur (Emile BENVENISTE, 1951 puis 1966) aboutit à une définition souple du concept, destinée à lui restituer sa profondeur initiale (Pierre SAUVANET, 2000). La communication proposera d’effectuer, à la lumière de la notion de rythme telle qu’elle est en passe de se transformer dans les années 1950-60 — au sein d’un contexte marqué par l’apparition de nouveaux médias et par la révolution technique du béton armé — une lecture particulière du procédé qui relie la conception de l’œuvre musicale Metastasis (1953) à celle du Pavillon Philips (1958). L’influence grecque et Corbuséenne de la métrique, la pensée de la fluidité et du mouvement, sont autant d’items qui tendront à décrypter le geste (Henri MALDINEY, 1965) de Xenakis. Un geste créateur « entre les mondes » de la musique et de l’architecture, et que nous supposerons rythmique.
Après un cursus de 12 années en CHAM au sein du Conservatoire National de Région de Lille (piano, harpe, chant lyrique, écriture, formation musicale), Zoé DECLERCQ obtient un Baccalauréat F11 - Techniques de la Musique. Elle s’oriente vers des études supérieures d’architecture à l’ISA Saint-Luc de Tournai où elle obtient son diplôme en 2010. Elle intègre la Faculté d’Architecture, Ingénierie architecturale, Urbanisme LOCI Tournai la même année en tant qu’assistante d’enseignement, puis comme assistante de recherche. Dans le cadre de ses activités universitaires, elle a l’occasion d’encadrer les ateliers de projet en cycle Master ainsi que les séances de Moyens d’expression et de dessin technique du cycle Bachelier. Parallèlement à cela, elle collabore jusqu’en 2017 à divers projets et concours d’architecture en agence. Elle mène actuellement une recherche doctorale (co-dir. J. Stillemans - S. Bridoux-Michel) sur la question du rythme au sein du Laboratoire Analyse et Architecture de l’UCL, où elle travaille comme Assistante d’enseignement et de recherche.